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Unpublished conference/Abstract (Scientific congresses and symposiums)
(Ap)prendre la parole, composer avec les morts : autour de Michel de Certeau
Hagelstein, Maud; Janvier, Antoine
2018La fabrique du commun. Langage, mémoire et éducation
 

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Keywords :
De Certeau; Abbé Grégoire; patois; idiome; langue; éducation; Dominique Julia; Jacques Revel; culture
Abstract :
[fr] Le 16 prairial, an II de la République, l’abbé Grégoire défend devant la Convention nationale son rapport « sur la nécessité et les moyens d’anéantir les patois et d’universaliser l’usage de la langue française » (p. 331). 1793, c’est l’époque où, sous la Convention, les idiomes non-français du territoire national apparaissent non seulement comme de simples obstacles passifs qu’une traduction des décrets et des actes adminsitratifs et judiciaire pourrait surmonter, mais comme « le lieu d’une résistance propre qui diffuse la contre-révolution » (p. 12). Grégoire souhaite prolonger et parfaire la décision prise quelques mois plus tôt par la Convention, suivant un premier rapport du Comité de salut public sur les « idiomes étrangers » présenté par Barère et approuvé par la Convention le 8 pluviôse an II. Pour Barère, « le fédéralisme et la superstition parlent bas breton ; l’émigration et la haine de la République parlent l’allemand ; la contre-révolution parle l’italien et le fanatisme parle basque. » (p. 12-13). Ce constat fonde un programme. Le rapport de Barère préconise l’installation d’un instituteur de langue française dans chaque commune des départements où se parlaient alors un idiome étranger (les départements du Finistère, du Morbihan, des Côtés-du-Nord, des Basses Pyrénées, du Haut et du Bas Rhin, etc.), en définissait les modalités concrètes (modalité de nomination, de rémunération, etc.), et fixait la tâche qui serait la leur.La démonstration à laquelle Grégoire se livre alors joue sur plusieurs plans. Un plan politique d’abord. La connaissance d’une langue nationale permet au peuple de prendre connaissance des lois et rendent possible à la fois la sanction des lois et leur obéissance. L’orientation démocratique de Grégoire le conduit à situer le danger d’une ignorance de la langue nationale par les membres des couches populaires : soit ces ignorants occuperont les places du pouvoir, et feront des lois aux termes impropres et aux idées imprécises ; soit ils en seront exclus au motif même de leur ignorance, et « bientôt renaîtra cette aristocratie qui jadis employait le patois pour montrer son affabilité protectrice à ceux qu’on appelait insolemment les petites gens. » Alors « la société sera réinfectée de gens comme il faut ; la liberté des suffrages sera restreinte, les cabales seront plus faciles à nouer, plus difficiles à rompre, et, par le fait, entre deux classes séparées s’établira une sorte de hiérarchie. » Bref, l’ignorance de la langue « détruirait l’égalité » (p. 335). Un plan technico-économique ensuite. Le partage d’une même langue par l’ensemble de la population permet la bonne tenue et réalisation du commerce d’une part, et d’autre part, la diffusion des connaissances, en particulier des connaissances techniques, en matière agricole et artisanale. En ce sens la mise à disposition du plus grand nombre de livres utiles à la production, destinés à remplacer almanachs (voir 344) et opuscules gros d’idées superstitieuses et d’erreurs ancestrales, s’avère essentielle pour assurer la supériorité de la Nation de la liberté. Un plan idéologique enfin. La langue nationale n’est pas seulement la langue commune : c’est la langue de la Nation. Les idiomes dangereux sont ces idiomes féodaux présents « vers nos frontières », idiomes « communs », mais « communs aux peuples des limites opposées » et favorisant l’établissement « avec nos ennemis des relations dangereuses » . A l’inverse, ces idiomes apparemment innocents que sont les jargons et dialectes intérieurs « sont autant de barrières » à l’intérieur même de la Nation, qui « empêchent l’amalgame politique, et d’un seul peuple en font trente » : aussi éloignés sont-ils des langues de l’ennemi extérieur, par leur action négative, ils en sont in fine complices (p. 337). C’est sur cette base que Grégoire préconise d’accentuer un mouvement déjà à l’œuvre sous l’effet de la révolution : « partout ces dialectes se dégrossissent, se rapprochent de la langue nationale » (p. 342). Il s’agit désormais d’« accélérer la destruction des patois » par « quelques moyens moraux » (p. 343) : par exemple, de cesser la traduction des décrets en dialectes vulgaires et d’obliger toutes les municipalités à ne faire usage que du français, de répandre, grâce aux écrvains républicains, « non de gros livres […] mais une foule d’opuscules patriotiques, qui contiendront des notions simples et lumineuses » (p. 343), de constituer, avec les journalistes, « une sorte de magistrature d’opinion » (p. 344), de démultiplier les chansons et poésies lyriques en français, et si possibles qu’elles soient « historiques et instructives » (p. 345), ainsi que les spectacles donnés en langue nationale, enfin, de mettre en place « une police » de toutes ces erreurs et scories qui « outragent la grammaire », partie par une entreprise de correction systématique par exemple des noms de places, de rues, et de lieux publics, ou, autre exemple, des accents laissés dans l’usage oral de la langue par les jargons, partie par un appel aux sociétés populaires et aux clubs de province à abandonner l’usage de leur dialecte, partie, enfin, par l’accomplissement actif du français comme langue pleine, claire et riche (voir p. 349-350). Bref : c’est le projet « de révolutionner notre langue » que propose Grégoire à la Convention.
Research center :
Projet "Logiques de l'agir" UFR SLHS - UNIVERSITÉ DE FRANCHE-COMTÉ
Disciplines :
Philosophy & ethics
Author, co-author :
Hagelstein, Maud ;  Université de Liège - ULiège > Département de philosophie > Esthétiques phénoménologiques et esth. de la différence
Janvier, Antoine ;  Université de Liège - ULiège > Département de philosophie > Département de philosophie
Language :
French
Title :
(Ap)prendre la parole, composer avec les morts : autour de Michel de Certeau
Publication date :
27 November 2018
Event name :
La fabrique du commun. Langage, mémoire et éducation
Event organizer :
Julien Paster, Rose-Marie Volle (UFR SLHS) - UNIVERSITÉ DE FRANCHE-COMTÉ
Event place :
Besançon, France
Event date :
du 27 au 28 novembre 2018
By request :
Yes
Audience :
International
Available on ORBi :
since 29 November 2018

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