No document available.
Abstract :
[fr] Cette contribution porte un intérêt singulier à la construction de l’action publique
par les intermédiaires privés et publics de l’emploi, au travers de leur mission
d’accompagnement des demandeurs d’emploi. Elle porte sur l’analyse des tensions intra
professionnelles qui résultent de la mise en oeuvre d’une politique d’activation, dans un
contexte de gestion mixte du marché du travail, en Belgique francophone. Elle prend
pour objet l’accompagnement des demandeurs d’emploi, en tant que mesure destinée à
assurer la réinsertion socioprofessionnelle des demandeurs d’emploi par une lutte contre
le chômage de longue durée et l’exclusion sociale (Orianne, 2006). Elle s’appuie sur
recherche empirique de nature qualitative (N=233 séquences d’observation ; N=40
entretiens semi-directifs), effectuée entre janvier 2013 et juin 2014 en Fédération
Wallonie-Bruxelles auprès du service public régional de l’emploi Bruxellois et d’un
prestataire privé.
Face à la nécessité croissante de fournir des services à un marché du travail flexible
et en évolution constante, d’impérieux besoins de transparence et de modernisation des
services publics de l’emploi belges sont apparus. Cette transformation de l’action
publique s’est notamment apparentée à une décentralisation partielle de leurs ressources
et de leurs responsabilités auprès de partenaires privés (agences d’emploi privées
commerciales ou opérateurs non-marchands) afin d’assurer conjointement la réinsertion
socioprofessionnelle des demandeurs d’emploi par la dispense d’un accompagnement
ciblé et personnalisé (Aubert et Patry, 2004). Par cette collaboration, les opérateurs
privés participent désormais activement à la construction de l’action publique par le
pouvoir qu’ils détiennent via l’exercice – par délégation – des fonctions étatiques alors
que jusque dans les années 80, l’État orientait, contrôlait et assurait seul la régulation du
marché du travail (Muller et Surel, 1998). En échange, tant les services publics de
l’emploi que les prestataires privés sont amenés, dans le cadre de leurs activités
d’accompagnement, à devoir rendre des comptes sur la réalisation effective de leurs
pratiques. Cette exigence d’accountability comporte un double but : être transparent et
légitimer l’utilisation de l’argent public.
S’inscrivant dans une sociologie de l’action publique, cette contribution tend à
rendre compte que cette forme de gouvernance de l’action publique (Lascoumes et Le
Galès, 2012 ; Yaya, 2005) repose sur une gestion par les procédures et sur une pression
aux résultats, transformant dès lors le travail quotidien des intermédiaires de l’emploi sous couvert d’une rationalisation de l’action publique. Ce faisant, elle démontre la
présence d’un conflit entre l’implémentation d’une mesure d’activation et l’évaluation
de son efficacité par les pouvoirs publics.