Regards croisés sur la représentation énonciative des genres dans les BD féminines contemporaines : le cas d’une BD africaine et d’une BD occidentale

La problématique des «Gender Studies » fait l’objet de multiples questionnements dans l’ensemble des études depuis quelques années. La question des genres a, d’une manière ou d’une autre, fait le tour de tous les arts. La bande dessinée (BD), elle aussi, n’a pas échappé à ce problème. En effet, si les BD ont longtemps été créées par les hommes (Hergé, Goscinny, Uderzo …) les femmes, de plus en plus aussi, ont investi ce médium. On assiste aujourd’hui à un véritable regain de créations dites « féminines » sur tous les continents ; bien entendu, le continent africain n’en fait pas exception. En effet, la question des genres y est encore plus aigüe, d’autant plus que, la femme y a toujours été marginalisée. Ce qui nous intéresse ici ce n’est pas de comprendre comment la BD donne à réfléchir sur les genres en en donnant des caractéristiques ou des outils de compréhension de la société moderne, mais de montrer comment cette dernière devient militante dès lors qu’elle réclame la parité au sein même des représentations. En d’autres termes, comment les bédéistes féminines au travers de ce médium interrogent-elles les normes de genres par l’image et mettent en place leur subversion ? Nous sommes tentés de répondre que tout est mis en jeu pour que les rôles actantiels les plus significatifs soient portés par des acteurs féminins. De plus, le dessin en lui-même, les cadrages et différentes perspectives ne sont plus que des instruments au service du dessinateur. Leur rôle servant à la réorganisation cognitive des informations présentes dans les mémoires collectives.
Nous prendrons appui sur la sémiotique de l’énonciation, dans une approche greimassienne, qui part du registre narratif pour comprendre les procédures sous-jacentes aux démarches de notre pensée à travers le registre logico-sémantique. Nous nous appuierons sur deux bédéistes, issues d’un univers culturel différent, pour comprendre comment l’une à travers la disposition spatiale des personnages (masculin/ féminin) sur la vignette et l’autre par la répartition des rôles actantiels créent un flou énonciatif visant à réorganiser les clivages et redonner aux femmes une place qui leurs aurait été déniée depuis bien longtemps.