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Abstract :
[fr] La majorité des poissons de récifs coralliens présentent un cycle de vie complexe, caractérisé
par une phase larvaire pélagique dispersive en milieu océanique, suivie d’une
phase benthique au sein du lagon ou sur la pente externe du récif. Ce travail porte sur
l'influence du stimulus sonore lors de la colonisation et de l'installation, au sein du récif,
des larves de poissons. De récentes études ont montré un effet attracteur du son de
récifs sur les larves de poissons et de crustacés. Mais on ignore encore la distance à
laquelle les larves sont capables de repérer le son du récif, ni si elles sont attirées par
une signature spectrale complexe ou plus simplement par la présence d'un "bruit". Enfin,
on ignore si les différents habitats d’un récif peuvent présenter des signatures
acoustiques propres, ni si les sons des habitats peuvent guider les larves lors de leur
installation au sein du récif.
L'étude de mesures de pression sonore le long de trois transects de 2 km effectuées sur
la côte nord de l'île de Moorea (Polynésie Française) met en évidence une diminution
régulière de l'intensité sonore jusqu'à une distance à la crête de 750-1000 m. Au-delà
de cette distance, et jusqu'à 2 km, une augmentation graduelle de la pression sonore
est observée. Dès lors, une larve située à 750-1000 m du récif se retrouve confrontée à
deux gradients de pression, l'un dirigés vers l'océan et l'autre vers le récif, et devra faire
appel à d'autres stimuli pour s'orienter vers ce dernier.
Au sein du récif, les sons provenant de 5 habitats de Moorea (crête interne, récif barrière,
récif frangeant, chenal et mangrove) ont été étudiés. Les signatures sonores de
chaque habitat (hormis crête interne et récif barrière) diffèrent des autres sur une certaine
gamme de fréquences, et ces différences sont conservées avec la distance (plusieurs
km). De plus, l'étude de l'influence des sons d'habitats et d'un son artificiel sur le
comportement des larves met en évidence une modification du comportement chez 16
des 20 espèces testées. Les différentes réponses illustrent deux stratégies d'installation
sur base du son: soit une sélection directe de l'habitat, soit un évitement de certains
habitats, et donc une sélection "par défaut" des habitats restants. Pourtant, les niveaux
de pression sonore des habitats du lagon sont sous les seuils de capacités sonores des
juvéniles d'Abudefduf vaigiensis, Acanthurus triostegus, Chaetodon citrinellus, Rhinecanthus
aculeatus et Myripristis kuntee. Ce paradoxe nous pousse à remettre en
question l'utilisation de l'outil "ABR" (Auditory Brainstem Response) dans les études de
perception et d'influence des sons sur le comportement des poissons.