La voix au prisme de la communication musicale

Dans les relations humaines où "tout est communication" (Watzlawick, 1967), certains échanges impliquent du son musical - c'est à dire culturellement organisé, en termes de durée, de hauteur, d'intensité et de timbre. Si celui-ci est au coeur même des interactions proprement musicales (musicien-musicien, ou musicien-auditeur), il ne s'y réduit pas : on le rencontre également dans les espaces publics (musique d'ambiance), dans la plupart des objets audio-visuels (bandes-son), et jusque dans les interactions verbales elles-mêmes (musicalité de la langue).

Cette omniprésence du musical dans les relations humaines autorise une interrogation selon une double perspective : celle de la dimension communicationnelle des phénomènes musicaux ; celle de la dimension musicale des objets et processus communicationnels. Dans le cadre de ma recherche doctorale, consacrée à l'effet réputé "bénéfique" des pratiques musicales sur le lien social, la seconde perspective a présidé à une enquête ethnographique réalisée en milieu scolaire, au cours de laquelle la voix s'est révélée comme objet d'étude de première importance pour la compréhension des relations qui s'instaurent entre les membres d'un groupe. Selon mes observations, en effet, certains phénomènes prosodiques ("tons" employés) - objectivables dans une certaine mesure à l'aide de logiciels spécialisés - seraient significatifs sur deux plans : la définition de rôles complémentaires dans des interactions-types et l'instauration d'un climat relationnel donné dans le groupe.

Confrontés aux travaux relatifs à la prosodie mère-bébé, et éclairés par la proposition de Gregory Bateson selon laquelle émotion et relation seraient les deux manifestations (l'une individuelle, l'autre collective) d'une même réalité (celle de l'interaction), les résultats de cette étude de terrain permettent actuellement l'hypothèse que la musicalité vocale serait un outil de premier ordre non seulement pour l'établissement du lien interpersonnel, mais également pour sa définition qualitative.